le Mythe du Dieu blanc
par damino - 5367 vues - 0 com.
Dans les temps obscurs de la préhistoire, des hommes blancs et barbus ont débarqué sur le littoral du Nouveau Monde. Ils sont venus aux Indiens, leur apportant les sciences, les techniques, de sages lois et tous les éléments d'une civilisation fort avancée.
C'est ce que racontent les antiques légendes des indigènes. D'après elles, les nouveaux arrivés, surgis de la mer, sont devenus les dieux blancs de l'empire indien.
Parmi tous les peuples civilisés du Nouveau Monde, la tradition d'un dieu blanc est restée vivante jusqu'à nos jours. Les Inca l'appelaient Kon Tiki Illac Viracocha, les Maya Kukulkan, les Toltèques et les Aztèques Quetzalcóatl. Chez les Chibcha, Bochica était « le manteau blanc de la lumière ».
Selon les vieilles légendes, un homme blanc était venu autrefois apporter aux Maya les lois, l'écriture, et tout le peuple le vénérait comme un dieu.
Selon les mythes, les dieux blancs avaient surgi de Test dans les temps lointains de la préhistoire, des étrangers sur des bateaux énormes aux ailes de cygne, aux flancs si éblouissants que l'on eût dit des serpents géants qui glissaient sur la mer.
Quand les bâtiments eurent abordé, il en descendit des étrangers blonds, à la peau blanche et aux yeux bleus, qui portaient un vêtement d'étoffe noire grossière, taillé en rond autour du cou et ouvert devant, avec de petites manches courtes et larges. Sur le front, ils avaient un ornement en forme de serpent.
Blanc et d'une effrayante laideur — parce qu'il portait une longue barbe — tel était le grand dieu du Mexique, Quetzalcóatl, selon les anciennes chroniques, mais aussi les statues et les bas-reliefs conservés, alors que les Indiens sont en général imberbes.
En fait, ce nom de Quetzalcóatl était le titre du grand-prêtre des Toltèques et il ne fut pas seul à le porter : tous ceux qui se sont succédé dans sa charge ont été désignés de la même façon, mais c'est sous cette dénomination qu'il est devenu le dieu des Indiens. Ce-acatl ou Nactil de son véritable nom, il était fils du dieu du ciel Mixcoatl (Serpent des nuages), et la déesse de la Terre Chipalman (Bouclier couché) l'avait, selon la légende, conçu sans tache.
Quetzalcóatl était devenu roi du peuple de Tollan en 977 de notre ère. C'est alors qu'avait commencé l'âge d'or pour les Toltèques. Venu d'un des pays du soleil levant, il portait un long vêtement et vivait caché dans son palais, comme il sied à un souverain. Ses richesses dépassaient l'imagination, ses demeures regorgeaient d'or, de pierreries, de joyaux et de plumes précieuses.
Il ne s'agit nullement là d'un personnage légendaire, mais du cinquième roi des Toltèques qui vécut de 947 à 999 après Jésus-Christ. Il apprit aux hommes toutes les sciences et les usages, leur donna de sages lois et leur enseigna l'agriculture ; dans son royaume, le maïs poussait à hauteur d'homme et le coton piquetait les champs de ses taches colorées.
Interdisant les sacrifices humains et prêchant la paix, il allait même plus loin : ses sujets ne devaient pas tuer d'animaux pour se nourrir, mais se contenter des fruits de la terre.
C'était bien l'âge d'or, mais il dura peu, car un démon induisit le souverain en tentation, lui fit commettre des péchés d'orgueil, d'intempérance, de luxure et l'amena même à négliger ses devoirs religieux.
Plein de honte et de contrition, il abandonna le pays avec ses serviteurs, après avoir caché ses trésors, rendu la liberté aux oiseaux de ses volières et changé les arbres en buissons épineux. Il se rendit alors sur le littoral sud du golfe.
D'après une autre légende, il serait resté vingt ans à Cholula, où les hommes auraient construit la grande pyramide en son honneur. Puis, au bout de ce temps, il aurait parlé encore une fois à son peuple et se serait rendu au bord de la mer pour monter de son plein gré sur un bûcher et s'y consumer. Son cœur serait devenu l'étoile du matin que les Aztèques appellent précisément Ce-acatl.
D'autres traditions rapportent qu'il se serait embarqué sur un navire qui l'aurait remmené dans le pays dont il était venu, mais il aurait promis aux siens de revenir.
Cieza de Léon, le vieux chroniqueur du Pérou, assure qu'un homme blanc et barbu était apparu à une époque fort ancienne aux Inca sur les bords du lac Titicaca. Personnalité puissante et créateur de toutes choses, il avait apporté aux habitants tous les éléments de la civilisation, ordonnant aux hommes de vivre en bonne intelligence et sans violences. C'était Tiki-Viracocha, encore appelé Tuapaca, ou Arunau.
Ce dieu qui était barbu et « blanc comme nous », écrit le chroniqueur, construisit une grande ville dont les temples abritaient de nombreuses statues à son effigie, comme d'ailleurs tous ceux du pays.
Mais par la suite, il quitta son peuple, non sans l'exhorter avant son départ à suivre ses enseignements. Surgi des eaux du lac Titicaca, il serait, selon Juan de Betanzos, parti de là avec son escorte vers Tiahuanaco. Il créa le soleil et les étoiles, car les ténèbres régnaient sur la Terre, puis, de grosses pierres, il fit les hommes, les animaux, et donna un roi aux humains.
D'après Ondegarde et Sarmiento, eux aussi anciens chroniqueurs du Pérou, des hommes blancs barbus sont apparus sur les rives du lac Titicaca, y ont construit une grande ville et ont amené les habitants à un haut degré de civilisation. Cette ville était si énorme que, selon les indigènes, des géants blancs seraient venus qui l'auraient édifiée — mille ans avant l'époque des Inca. Tout au moins, c'est ce que rapportent les chroniqueurs.
Par la suite, le dieu blanc serait entré en guerre contre le chef Cari de Coquimba qui l'aurait vaincu et massacré tous ses hommes. Sa ville fut détruite ; seuls les femmes et les enfants restèrent en vie. Mais Viracocha réussit à s'échapper avec quelques-uns de ses fidèles, atteignit la mer et s'éloigna sur les vagues, porté par un manteau magique après avoir promis de revenir.
Viracocha est pour les Andes, le Pérou, tout le continent sud, ce que Quetzalcóatl est pour le Mexique : le héros divinisé, venu de la mer ou surgi des eaux pour créer toutes choses. Les Aymara appelaient leur dieu blanc Hyustus et racontent aujourd'hui encore qu'il était blond aux yeux bleus.
Traduit textuellement, Viracocha signifie « écume de mer ». La science répugne à employer ce nom qui, selon elle, n'a pas de sens, mais il représente cependant une réalité, car pour les Colla de la Bolivie actuelle, il désigne le dieu du vent et quand un ouragan fouette les vagues du lac Titicaca en écume mousseuse, les anciens déclarent : « Voilà Viracocha qui vient. »
D'abord appelé Kon Tiki Viracocha, il devint ensuite Kon Tiki Illac Viracocha.
Kon (qui signifie soleil) était le dieu des Chimu. Tiki a le même sens dans la langue des Aymara et de plus il désigne une divinité polynésienne. Illac est l'éclair. « Il est le soleil du soleil, il est le créateur du monde », dit une prière inca. Partout dans les royaumes indiens du Nouveau Monde ces légendes d'un « dieu blanc » sont connues et partout elles se terminent de la même façon : il a quitté son peuple, mais en lui promettant formellement de revenir.
Partout, aujourd'hui encore, chez les Maya, au Mexique comme au Pérou et en Bolivie, cette tradition est demeurée vivante.
Mais les spécialistes modernes savent que ce mythe a été une des causes principales de la rapide décadence des royaumes indiens. Les indigènes avaient encore si nette devant les yeux l'image de leur dieu blanc que — sans hésiter une seconde —-ils accueillirent les conquérants espagnols comme s'ils représentaient celui qu’ils attendaient depuis tant de générations.
Les prêtres des Aztèques avaient calculé que, parti une année Ce-acatl (Un-Roseau) il reparaîtrait aussi une année Ce-acatl. Or, elle revient tous les cinquante-deux ans dans leur calendrier. Chaque fois, après un examen attentif des astres et autres signes, les augures annonçaient que le dieu serait là à la prochaine fête de la nouvelle année.
Par un des caprices du sort les plus extraordinaires que l’on ait connus, c'est peu avant le début d'une telle année que se répandit la nouvelle de l'arrivée en vue des côtes de « maisons d'eau avec des ailes de cygne » et au moment même où elle commençait, que l'Espagnol Cortez posait le pied sur la terre mexicaine ! Même la date coïncidait exactement avec celle que les prêtres avaient calculée pour le retour du dieu d'après d'anciennes sources : le jour du « neuf-vent ».
Le jour du « neuf-vent » de l'année « un-roseau » tombait le 22 avril 1519, un jeudi saint d'après notre calendrier. Et c'est ce jour-là que Cortez débarqua !
Le dieu blanc venu autrefois, bien, bien longtemps auparavant, portait une barrette noire et un vêtement noir — tout comme Cortez lorsqu'il descendit à terre et cela presque à l'endroit où le personnage divin avait quitté son peuple avec la promesse de revenir. Les indigènes pouvaient-ils encore douter que le nouvel arrivé fût celui-là même qu'ils attendaient depuis tant de siècles?
Mais ces dieux-là arrivaient avec le feu et le glaive.
Ils étaient certes blancs et barbus, mais ce n'était pourtant qu'un ramassis de mercenaires et d'aventuriers avides d'or qui faisaient bon marché de la vie humaine.
Les Indiens se ruèrent à leur perte les yeux fermés. Leurs civilisations florissantes furent anéanties dans le sang et la fumée. Mais ce que les Espagnols leur faisaient subir, ils le prenaient pour le châtiment du dieu blanc revenu afin de rétablir son ancien empire. Toutefois ce n’est pas tant cette croyance fanatique qui donna à une poignée d'aventuriers la possibilité de détruire jusque dans ses racines la culture d'un continent, que la guerre civile qui minait l’empire incas et le désir de revanche qui couvait dans les tribus soumises aux aztèques et aux incas.
Lorsque les indigènes s'éveillèrent enfin de leur rêve, il était trop tard. Il ne restait plus rien de leurs anciennes civilisations.
Seules, les langues ont survécu aux désastres et aux siècles. Plus de deux millions d'Indiens parlent aujourd'hui encore le maya, plus d'un demi-million, l'aztèque, près d'un million, l'otomi, le zapotèque, le mixtèque et le tarasque, quelques millions l'aymara, le quechua et le mochica. Lorsqu'un recensement fut effectué au Pérou en 1940, il s'avéra que 40 % des écoliers parlaient le quechua, la plus ancienne langue des Inca ou l'aymara, et que plus d'un tiers ne comprenaient pas l'espagnol.
Quand on étudie les populations, sur les hautes terres du Pérou, c'est comme si les antiques statues et les coupes céphalomorphes ressuscitaient, car on retrouve exactement leurs traits chez les hommes qui vivent aujourd'hui dans les montagnes.
Et une autre chose encore a été préservée tout au long des siècles : la salutation des Indiens à l'adresse de l'étranger quand il a leur confiance. C'est aujourd'hui comme il y a des millénaires : « Viracocha », (Dieu blanc).
Que l'on pénètre dans la hutte d'un Indien au milieu de la jungle du Yucatan, que l'on s'asseye avec un ancien auprès du feu sur les hauts plateaux glacés de la Bolivie, ou que l'on rencontre des indigènes dans l'enfer vert de l'Amazonie, partout on raconte aujourd'hui encore la légende des hommes blancs, barbus, surgis dans les temps lointains de la préhistoire pour devenir les dieux du Nouveau Monde.
Le Dieu blanc des Indiens est immortel.
C'est ce que racontent les antiques légendes des indigènes. D'après elles, les nouveaux arrivés, surgis de la mer, sont devenus les dieux blancs de l'empire indien.
Parmi tous les peuples civilisés du Nouveau Monde, la tradition d'un dieu blanc est restée vivante jusqu'à nos jours. Les Inca l'appelaient Kon Tiki Illac Viracocha, les Maya Kukulkan, les Toltèques et les Aztèques Quetzalcóatl. Chez les Chibcha, Bochica était « le manteau blanc de la lumière ».
Selon les vieilles légendes, un homme blanc était venu autrefois apporter aux Maya les lois, l'écriture, et tout le peuple le vénérait comme un dieu.
Selon les mythes, les dieux blancs avaient surgi de Test dans les temps lointains de la préhistoire, des étrangers sur des bateaux énormes aux ailes de cygne, aux flancs si éblouissants que l'on eût dit des serpents géants qui glissaient sur la mer.
Quand les bâtiments eurent abordé, il en descendit des étrangers blonds, à la peau blanche et aux yeux bleus, qui portaient un vêtement d'étoffe noire grossière, taillé en rond autour du cou et ouvert devant, avec de petites manches courtes et larges. Sur le front, ils avaient un ornement en forme de serpent.
Blanc et d'une effrayante laideur — parce qu'il portait une longue barbe — tel était le grand dieu du Mexique, Quetzalcóatl, selon les anciennes chroniques, mais aussi les statues et les bas-reliefs conservés, alors que les Indiens sont en général imberbes.
En fait, ce nom de Quetzalcóatl était le titre du grand-prêtre des Toltèques et il ne fut pas seul à le porter : tous ceux qui se sont succédé dans sa charge ont été désignés de la même façon, mais c'est sous cette dénomination qu'il est devenu le dieu des Indiens. Ce-acatl ou Nactil de son véritable nom, il était fils du dieu du ciel Mixcoatl (Serpent des nuages), et la déesse de la Terre Chipalman (Bouclier couché) l'avait, selon la légende, conçu sans tache.
Quetzalcóatl était devenu roi du peuple de Tollan en 977 de notre ère. C'est alors qu'avait commencé l'âge d'or pour les Toltèques. Venu d'un des pays du soleil levant, il portait un long vêtement et vivait caché dans son palais, comme il sied à un souverain. Ses richesses dépassaient l'imagination, ses demeures regorgeaient d'or, de pierreries, de joyaux et de plumes précieuses.
Il ne s'agit nullement là d'un personnage légendaire, mais du cinquième roi des Toltèques qui vécut de 947 à 999 après Jésus-Christ. Il apprit aux hommes toutes les sciences et les usages, leur donna de sages lois et leur enseigna l'agriculture ; dans son royaume, le maïs poussait à hauteur d'homme et le coton piquetait les champs de ses taches colorées.
Interdisant les sacrifices humains et prêchant la paix, il allait même plus loin : ses sujets ne devaient pas tuer d'animaux pour se nourrir, mais se contenter des fruits de la terre.
C'était bien l'âge d'or, mais il dura peu, car un démon induisit le souverain en tentation, lui fit commettre des péchés d'orgueil, d'intempérance, de luxure et l'amena même à négliger ses devoirs religieux.
Plein de honte et de contrition, il abandonna le pays avec ses serviteurs, après avoir caché ses trésors, rendu la liberté aux oiseaux de ses volières et changé les arbres en buissons épineux. Il se rendit alors sur le littoral sud du golfe.
D'après une autre légende, il serait resté vingt ans à Cholula, où les hommes auraient construit la grande pyramide en son honneur. Puis, au bout de ce temps, il aurait parlé encore une fois à son peuple et se serait rendu au bord de la mer pour monter de son plein gré sur un bûcher et s'y consumer. Son cœur serait devenu l'étoile du matin que les Aztèques appellent précisément Ce-acatl.
D'autres traditions rapportent qu'il se serait embarqué sur un navire qui l'aurait remmené dans le pays dont il était venu, mais il aurait promis aux siens de revenir.
Cieza de Léon, le vieux chroniqueur du Pérou, assure qu'un homme blanc et barbu était apparu à une époque fort ancienne aux Inca sur les bords du lac Titicaca. Personnalité puissante et créateur de toutes choses, il avait apporté aux habitants tous les éléments de la civilisation, ordonnant aux hommes de vivre en bonne intelligence et sans violences. C'était Tiki-Viracocha, encore appelé Tuapaca, ou Arunau.
Ce dieu qui était barbu et « blanc comme nous », écrit le chroniqueur, construisit une grande ville dont les temples abritaient de nombreuses statues à son effigie, comme d'ailleurs tous ceux du pays.
Mais par la suite, il quitta son peuple, non sans l'exhorter avant son départ à suivre ses enseignements. Surgi des eaux du lac Titicaca, il serait, selon Juan de Betanzos, parti de là avec son escorte vers Tiahuanaco. Il créa le soleil et les étoiles, car les ténèbres régnaient sur la Terre, puis, de grosses pierres, il fit les hommes, les animaux, et donna un roi aux humains.
D'après Ondegarde et Sarmiento, eux aussi anciens chroniqueurs du Pérou, des hommes blancs barbus sont apparus sur les rives du lac Titicaca, y ont construit une grande ville et ont amené les habitants à un haut degré de civilisation. Cette ville était si énorme que, selon les indigènes, des géants blancs seraient venus qui l'auraient édifiée — mille ans avant l'époque des Inca. Tout au moins, c'est ce que rapportent les chroniqueurs.
Par la suite, le dieu blanc serait entré en guerre contre le chef Cari de Coquimba qui l'aurait vaincu et massacré tous ses hommes. Sa ville fut détruite ; seuls les femmes et les enfants restèrent en vie. Mais Viracocha réussit à s'échapper avec quelques-uns de ses fidèles, atteignit la mer et s'éloigna sur les vagues, porté par un manteau magique après avoir promis de revenir.
Viracocha est pour les Andes, le Pérou, tout le continent sud, ce que Quetzalcóatl est pour le Mexique : le héros divinisé, venu de la mer ou surgi des eaux pour créer toutes choses. Les Aymara appelaient leur dieu blanc Hyustus et racontent aujourd'hui encore qu'il était blond aux yeux bleus.
Traduit textuellement, Viracocha signifie « écume de mer ». La science répugne à employer ce nom qui, selon elle, n'a pas de sens, mais il représente cependant une réalité, car pour les Colla de la Bolivie actuelle, il désigne le dieu du vent et quand un ouragan fouette les vagues du lac Titicaca en écume mousseuse, les anciens déclarent : « Voilà Viracocha qui vient. »
D'abord appelé Kon Tiki Viracocha, il devint ensuite Kon Tiki Illac Viracocha.
Kon (qui signifie soleil) était le dieu des Chimu. Tiki a le même sens dans la langue des Aymara et de plus il désigne une divinité polynésienne. Illac est l'éclair. « Il est le soleil du soleil, il est le créateur du monde », dit une prière inca. Partout dans les royaumes indiens du Nouveau Monde ces légendes d'un « dieu blanc » sont connues et partout elles se terminent de la même façon : il a quitté son peuple, mais en lui promettant formellement de revenir.
Partout, aujourd'hui encore, chez les Maya, au Mexique comme au Pérou et en Bolivie, cette tradition est demeurée vivante.
Mais les spécialistes modernes savent que ce mythe a été une des causes principales de la rapide décadence des royaumes indiens. Les indigènes avaient encore si nette devant les yeux l'image de leur dieu blanc que — sans hésiter une seconde —-ils accueillirent les conquérants espagnols comme s'ils représentaient celui qu’ils attendaient depuis tant de générations.
Les prêtres des Aztèques avaient calculé que, parti une année Ce-acatl (Un-Roseau) il reparaîtrait aussi une année Ce-acatl. Or, elle revient tous les cinquante-deux ans dans leur calendrier. Chaque fois, après un examen attentif des astres et autres signes, les augures annonçaient que le dieu serait là à la prochaine fête de la nouvelle année.
Par un des caprices du sort les plus extraordinaires que l’on ait connus, c'est peu avant le début d'une telle année que se répandit la nouvelle de l'arrivée en vue des côtes de « maisons d'eau avec des ailes de cygne » et au moment même où elle commençait, que l'Espagnol Cortez posait le pied sur la terre mexicaine ! Même la date coïncidait exactement avec celle que les prêtres avaient calculée pour le retour du dieu d'après d'anciennes sources : le jour du « neuf-vent ».
Le jour du « neuf-vent » de l'année « un-roseau » tombait le 22 avril 1519, un jeudi saint d'après notre calendrier. Et c'est ce jour-là que Cortez débarqua !
Le dieu blanc venu autrefois, bien, bien longtemps auparavant, portait une barrette noire et un vêtement noir — tout comme Cortez lorsqu'il descendit à terre et cela presque à l'endroit où le personnage divin avait quitté son peuple avec la promesse de revenir. Les indigènes pouvaient-ils encore douter que le nouvel arrivé fût celui-là même qu'ils attendaient depuis tant de siècles?
Mais ces dieux-là arrivaient avec le feu et le glaive.
Ils étaient certes blancs et barbus, mais ce n'était pourtant qu'un ramassis de mercenaires et d'aventuriers avides d'or qui faisaient bon marché de la vie humaine.
Les Indiens se ruèrent à leur perte les yeux fermés. Leurs civilisations florissantes furent anéanties dans le sang et la fumée. Mais ce que les Espagnols leur faisaient subir, ils le prenaient pour le châtiment du dieu blanc revenu afin de rétablir son ancien empire. Toutefois ce n’est pas tant cette croyance fanatique qui donna à une poignée d'aventuriers la possibilité de détruire jusque dans ses racines la culture d'un continent, que la guerre civile qui minait l’empire incas et le désir de revanche qui couvait dans les tribus soumises aux aztèques et aux incas.
Lorsque les indigènes s'éveillèrent enfin de leur rêve, il était trop tard. Il ne restait plus rien de leurs anciennes civilisations.
Seules, les langues ont survécu aux désastres et aux siècles. Plus de deux millions d'Indiens parlent aujourd'hui encore le maya, plus d'un demi-million, l'aztèque, près d'un million, l'otomi, le zapotèque, le mixtèque et le tarasque, quelques millions l'aymara, le quechua et le mochica. Lorsqu'un recensement fut effectué au Pérou en 1940, il s'avéra que 40 % des écoliers parlaient le quechua, la plus ancienne langue des Inca ou l'aymara, et que plus d'un tiers ne comprenaient pas l'espagnol.
Quand on étudie les populations, sur les hautes terres du Pérou, c'est comme si les antiques statues et les coupes céphalomorphes ressuscitaient, car on retrouve exactement leurs traits chez les hommes qui vivent aujourd'hui dans les montagnes.
Et une autre chose encore a été préservée tout au long des siècles : la salutation des Indiens à l'adresse de l'étranger quand il a leur confiance. C'est aujourd'hui comme il y a des millénaires : « Viracocha », (Dieu blanc).
Que l'on pénètre dans la hutte d'un Indien au milieu de la jungle du Yucatan, que l'on s'asseye avec un ancien auprès du feu sur les hauts plateaux glacés de la Bolivie, ou que l'on rencontre des indigènes dans l'enfer vert de l'Amazonie, partout on raconte aujourd'hui encore la légende des hommes blancs, barbus, surgis dans les temps lointains de la préhistoire pour devenir les dieux du Nouveau Monde.
Le Dieu blanc des Indiens est immortel.
La Conquista du Mexique.
Le 12 octobre 1492, Colomb abordait une petite île de l'archipel des Bahamas qu'il nomma San Salvador. C'est cet événement qui passe pour marquer la découverte de l'Amérique. Et c'est ce jour-là qu'Espagnols et Indiens se rencontrèrent pour la première fois.
« J'ai reconnu », écrit Colomb dans une lettre à la cour d'Espagne, « que ce sont là des gens qui se laisseraient convertir à notre sainte croyance plutôt par la douceur que par la force et j'ai donné à quelques-uns des perles de verre, des coiffures bariolées qui leur ont causé une grande joie et nous ont rapidement valu leur amitié... »
Vingt ans après, d'autres explorateurs avaient reconnu le littoral de l'Amérique du sud jusqu'au Rio de la Plata, Sébastien Cabot était descendu du nord jusqu'à la Floride, Balboa avait traversé l'isthme de Panama et planté le drapeau espagnol sur le rivage de l'océan Pacifique. Mais la découverte la plus éblouissante restait à faire. Inconnus de tous, de l'autre côté du vaste golfe du Mexique, des villes et des empires subsistaient. Les Espagnols ne s'étaient solidement établis que dans les îles côtières.
Quand Isabelle de Castille, la grande bienfaitrice de Colomb, mourut en 1504, il y avait sur de nombreuses îles des « Indes occidentales » des établissements espagnols qui exportaient en métropole toutes sortes de bois, de teinture, des métaux et de la canne à sucre. Un gouverneur espagnol, Velasquez, résidait à Cuba. Quand il apprit, par un navigateur aventureux qui avait été jeté à la côte, qu'il y avait là-bas de riches villes indiennes, il arma en 1518 quelques navires qui finirent par atteindre le littoral de l'Amérique centrale. Plus loin dans l'ouest, d'après ce que les indigènes primitifs de l'île avaient raconté à Velâsquez, c'était l'Eldorado, le pays de l'or dont les Espagnols rêvaient depuis si longtemps.
Le gouverneur résolut de le trouver. Pour cela, il organisa une expédition, enrôla des volontaires et, le 18 février 1519, une flotte de onze navires portant no marins, 553 soldats et 200 Indiens avec dix pièces d'artillerie lourde, quatre légères et seize chevaux, quittait Cuba pour se lancer à la découverte du pays fabuleux.
Le commandant de ces forces était Hernando Cortez, noble espagnol de trente et un an établi depuis 1511 à Cuba où il avait amassé une certaine fortune en terres et laveries d'or. Il partait à la recherche du pays des Aztèques : un empire de millions d'Indiens qui maîtrisaient d'une poigne féroce les peuples qu'ils avaient vaincus. Leur souverain avait signé avec trois États voisins un pacte qui contraignait les tribus soumises à payer tribut, à livrer des esclaves et à supporter l'occupation étrangère. Mais cela, Cortez ne le savait pas encore.
Le Conquistador, puisque c'est ainsi que l'histoire a nommé le conquérant du continent, longea la côte du Yucatan jusqu'à l'embouchure du rio Tabasco où il fut reçu par des guerriers indiens prêts au combat. La bataille se déroula dans la plaine de Ceutla — non loin des ruines de Palenque qui allaient devenir si célèbres — et la victoire fut remportée par les Espagnols grâce à leur supériorité en armement. Ils occupèrent la ville de Tabasco, les chefs indigènes durent se rendre et ils apportèrent à leurs vainqueurs des présents, entre autres vingt jeunes femmes.
Il y avait parmi elles une esclave qui parlait la langue du Mexique aussi bien que celle des Maya. Nommée dona Marina, intelligente, fidèle et sûre, elle devint l'interprète de Cortez... mais aussi sa maîtresse et raccompagna dans tous ses déplacements. Les Aztèques l'appelaient Malintzin : née dans la région d'Acayuan, elle était fille de cacique, mais après la mort de son père elle avait été vendue comme esclave par son beau-père, sans doute avec l'assentiment de sa mère, pour qu'elle ne pût réclamer sa part d'héritage.
Elle devait se marier deux fois par la suite, toujours avec des officiers supérieurs espagnols. Elle avait donné un fils à Cortez, don Martin, qui eut par la suite une fin tragique. D'après les chroniqueurs, elle avait un charme extraordinaire et une grande noblesse de sentiments. « Elle savait mener les Indiens exactement à son gré et nous a ainsi rendu des services de la plus grande importance. »
Malintzin se trouve au centre même de l'aventure qui commençait alors, l'un des tournants les plus décisifs de l'histoire mondiale. Son nom est vivant aujourd'hui encore dans les récits et les chansons des Indiens.
Montezuma, empereur des Aztèques, informé depuis longtemps du débarquement des Espagnols, envoya des messagers chargés de présents à Cortez, mais aussi l'ordre aux étrangers de quitter le pays.
Rien n'était plus loin de leurs intentions.
La première grande ville du Nouveau Monde où entrèrent les Espagnols fut Cempoala, capitale des Totonaques. Ses habitants ne ressemblaient guère aux populations à demi sauvages des îles : habillés de vêtements richement brodés, ils vivaient dans des maisons de pierre et d'argile, au milieu de temples et de palais.
C'est dans cette agglomération, qui pouvait compter environ 30 000 âmes, que Cortez se rendit compte pour la première fois de la haine qui grondait contre les Aztèques. Il apprit que le pays des Totonaques, avec ses trente villes et villages, devait payer aux occupants un tribut impitoyablement prélevé. Et quand la contribution n'était pas réunie au moment voulu, les guerriers aztèques enlevaient jeunes gens et jeunes filles pour les sacrifier à leurs dieux sur les autels de Tenochtitlan, la capitale des hauts plateaux.
De Cempoala où les indigènes avaient contemplé avec un respect admiratif Cortez et sa suite dans leurs armures étincelantes, montés sur ces créatures mystérieuses, mi-hommes, mi-bêtes, les cavaliers, le chef de l'expédition revint à La Vera Cruz, sur la côte, d'où il écrivit à son souverain, Charles Quint, une lettre qui peignait avec les couleurs les plus alléchantes la perspective de conquérir un vaste empire. Mais avant même que le navire eût levé l'ancre pour rentrer en Espagne avec cette missive, Cortez découvrit une conjuration des partisans de Velâsquez qui projetaient de l'évincer, lui, le chef absolu et impitoyable. Il fit mettre à mort les principaux meneurs, puis détruire ses bateaux pour rompre tous les liens avec le monde extérieur et couper la retraite à ses soldats.
Il avait devant lui l'empire de Montezuma, dont les dispositions à son égard n'étaient nullement amicales et des dizaines de milliers de guerriers farouches. La petite troupe ne s'en lança pas moins bravement vers l'ouest, en tournant le dos à la côte. Au bout de bien des journées de marche à travers des régions montagneuses désolées, elle arriva au pays des Tlaxcalans qui l'accueillirent les armes à la main. Des escarmouches s'ensuivirent et enfin une véritable bataille rangée qui se solda par de si lourdes pertes pour les indigènes qu'ils implorèrent la paix et se soumirent aux Espagnols.
Là, dans cette ville de Tlaxcala, si belle et si imposante que Cortez la compare à Grenade, un nouvel envoyé de l'empereur fit son apparition, toujours avec de riches présents et, cette fois, la permission de lui rendre visite dans sa résidence de Tenochtitlan. Il priait seulement les étrangers de prendre la route passant par Cholula.
Les Tlaxcalans, désormais alliés des Blancs, leur déconseillèrent formellement cet itinéraire, assurant qu'il s'agissait d'un guet-apen et que Montezuma voulait les cerner à Cholula. Cortez hésita, puis décida de passer outre, car cette dernière ville lui avait envoyé une invitation.
C'était bien un piège. Deux mille hommes attendaient les envahisseurs étrangers mais les cavaliers, les canons et les nouveaux alliés de Cortez furent les plus forts.
Les Indiens s'enfuirent. Des maisons écroulées, des charpentes en flammes, des assassinats et des horreurs sans nombre marquèrent la fin de Cholula. Les prêtres qui s'étaient retranchés dans les vastes temples se précipitèrent du haut des terrasses quand ils virent que la bataille était perdue. Quand le fracas des armes s'éteignit, la ville était en grande partie détruite. Six mille cadavres jonchaient les rues.
Pour les indigènes, cette effroyable défaite était le châtiment du dieu blanc. De nombreuses villes voisines envoyèrent des émissaires pour proposer leur soumission.
Rien ne pouvait plus désormais arrêter Cortez. A la tête de sa petite armée, il triompha des obstacles de la sierra et se dirigea droit vers la capitale, à la lisière des neiges éternelles.
« J'ai reconnu », écrit Colomb dans une lettre à la cour d'Espagne, « que ce sont là des gens qui se laisseraient convertir à notre sainte croyance plutôt par la douceur que par la force et j'ai donné à quelques-uns des perles de verre, des coiffures bariolées qui leur ont causé une grande joie et nous ont rapidement valu leur amitié... »
Vingt ans après, d'autres explorateurs avaient reconnu le littoral de l'Amérique du sud jusqu'au Rio de la Plata, Sébastien Cabot était descendu du nord jusqu'à la Floride, Balboa avait traversé l'isthme de Panama et planté le drapeau espagnol sur le rivage de l'océan Pacifique. Mais la découverte la plus éblouissante restait à faire. Inconnus de tous, de l'autre côté du vaste golfe du Mexique, des villes et des empires subsistaient. Les Espagnols ne s'étaient solidement établis que dans les îles côtières.
Quand Isabelle de Castille, la grande bienfaitrice de Colomb, mourut en 1504, il y avait sur de nombreuses îles des « Indes occidentales » des établissements espagnols qui exportaient en métropole toutes sortes de bois, de teinture, des métaux et de la canne à sucre. Un gouverneur espagnol, Velasquez, résidait à Cuba. Quand il apprit, par un navigateur aventureux qui avait été jeté à la côte, qu'il y avait là-bas de riches villes indiennes, il arma en 1518 quelques navires qui finirent par atteindre le littoral de l'Amérique centrale. Plus loin dans l'ouest, d'après ce que les indigènes primitifs de l'île avaient raconté à Velâsquez, c'était l'Eldorado, le pays de l'or dont les Espagnols rêvaient depuis si longtemps.
Le gouverneur résolut de le trouver. Pour cela, il organisa une expédition, enrôla des volontaires et, le 18 février 1519, une flotte de onze navires portant no marins, 553 soldats et 200 Indiens avec dix pièces d'artillerie lourde, quatre légères et seize chevaux, quittait Cuba pour se lancer à la découverte du pays fabuleux.
Le commandant de ces forces était Hernando Cortez, noble espagnol de trente et un an établi depuis 1511 à Cuba où il avait amassé une certaine fortune en terres et laveries d'or. Il partait à la recherche du pays des Aztèques : un empire de millions d'Indiens qui maîtrisaient d'une poigne féroce les peuples qu'ils avaient vaincus. Leur souverain avait signé avec trois États voisins un pacte qui contraignait les tribus soumises à payer tribut, à livrer des esclaves et à supporter l'occupation étrangère. Mais cela, Cortez ne le savait pas encore.
Le Conquistador, puisque c'est ainsi que l'histoire a nommé le conquérant du continent, longea la côte du Yucatan jusqu'à l'embouchure du rio Tabasco où il fut reçu par des guerriers indiens prêts au combat. La bataille se déroula dans la plaine de Ceutla — non loin des ruines de Palenque qui allaient devenir si célèbres — et la victoire fut remportée par les Espagnols grâce à leur supériorité en armement. Ils occupèrent la ville de Tabasco, les chefs indigènes durent se rendre et ils apportèrent à leurs vainqueurs des présents, entre autres vingt jeunes femmes.
Il y avait parmi elles une esclave qui parlait la langue du Mexique aussi bien que celle des Maya. Nommée dona Marina, intelligente, fidèle et sûre, elle devint l'interprète de Cortez... mais aussi sa maîtresse et raccompagna dans tous ses déplacements. Les Aztèques l'appelaient Malintzin : née dans la région d'Acayuan, elle était fille de cacique, mais après la mort de son père elle avait été vendue comme esclave par son beau-père, sans doute avec l'assentiment de sa mère, pour qu'elle ne pût réclamer sa part d'héritage.
Elle devait se marier deux fois par la suite, toujours avec des officiers supérieurs espagnols. Elle avait donné un fils à Cortez, don Martin, qui eut par la suite une fin tragique. D'après les chroniqueurs, elle avait un charme extraordinaire et une grande noblesse de sentiments. « Elle savait mener les Indiens exactement à son gré et nous a ainsi rendu des services de la plus grande importance. »
Malintzin se trouve au centre même de l'aventure qui commençait alors, l'un des tournants les plus décisifs de l'histoire mondiale. Son nom est vivant aujourd'hui encore dans les récits et les chansons des Indiens.
Montezuma, empereur des Aztèques, informé depuis longtemps du débarquement des Espagnols, envoya des messagers chargés de présents à Cortez, mais aussi l'ordre aux étrangers de quitter le pays.
Rien n'était plus loin de leurs intentions.
La première grande ville du Nouveau Monde où entrèrent les Espagnols fut Cempoala, capitale des Totonaques. Ses habitants ne ressemblaient guère aux populations à demi sauvages des îles : habillés de vêtements richement brodés, ils vivaient dans des maisons de pierre et d'argile, au milieu de temples et de palais.
C'est dans cette agglomération, qui pouvait compter environ 30 000 âmes, que Cortez se rendit compte pour la première fois de la haine qui grondait contre les Aztèques. Il apprit que le pays des Totonaques, avec ses trente villes et villages, devait payer aux occupants un tribut impitoyablement prélevé. Et quand la contribution n'était pas réunie au moment voulu, les guerriers aztèques enlevaient jeunes gens et jeunes filles pour les sacrifier à leurs dieux sur les autels de Tenochtitlan, la capitale des hauts plateaux.
De Cempoala où les indigènes avaient contemplé avec un respect admiratif Cortez et sa suite dans leurs armures étincelantes, montés sur ces créatures mystérieuses, mi-hommes, mi-bêtes, les cavaliers, le chef de l'expédition revint à La Vera Cruz, sur la côte, d'où il écrivit à son souverain, Charles Quint, une lettre qui peignait avec les couleurs les plus alléchantes la perspective de conquérir un vaste empire. Mais avant même que le navire eût levé l'ancre pour rentrer en Espagne avec cette missive, Cortez découvrit une conjuration des partisans de Velâsquez qui projetaient de l'évincer, lui, le chef absolu et impitoyable. Il fit mettre à mort les principaux meneurs, puis détruire ses bateaux pour rompre tous les liens avec le monde extérieur et couper la retraite à ses soldats.
Il avait devant lui l'empire de Montezuma, dont les dispositions à son égard n'étaient nullement amicales et des dizaines de milliers de guerriers farouches. La petite troupe ne s'en lança pas moins bravement vers l'ouest, en tournant le dos à la côte. Au bout de bien des journées de marche à travers des régions montagneuses désolées, elle arriva au pays des Tlaxcalans qui l'accueillirent les armes à la main. Des escarmouches s'ensuivirent et enfin une véritable bataille rangée qui se solda par de si lourdes pertes pour les indigènes qu'ils implorèrent la paix et se soumirent aux Espagnols.
Là, dans cette ville de Tlaxcala, si belle et si imposante que Cortez la compare à Grenade, un nouvel envoyé de l'empereur fit son apparition, toujours avec de riches présents et, cette fois, la permission de lui rendre visite dans sa résidence de Tenochtitlan. Il priait seulement les étrangers de prendre la route passant par Cholula.
Les Tlaxcalans, désormais alliés des Blancs, leur déconseillèrent formellement cet itinéraire, assurant qu'il s'agissait d'un guet-apen et que Montezuma voulait les cerner à Cholula. Cortez hésita, puis décida de passer outre, car cette dernière ville lui avait envoyé une invitation.
C'était bien un piège. Deux mille hommes attendaient les envahisseurs étrangers mais les cavaliers, les canons et les nouveaux alliés de Cortez furent les plus forts.
Les Indiens s'enfuirent. Des maisons écroulées, des charpentes en flammes, des assassinats et des horreurs sans nombre marquèrent la fin de Cholula. Les prêtres qui s'étaient retranchés dans les vastes temples se précipitèrent du haut des terrasses quand ils virent que la bataille était perdue. Quand le fracas des armes s'éteignit, la ville était en grande partie détruite. Six mille cadavres jonchaient les rues.
Pour les indigènes, cette effroyable défaite était le châtiment du dieu blanc. De nombreuses villes voisines envoyèrent des émissaires pour proposer leur soumission.
Rien ne pouvait plus désormais arrêter Cortez. A la tête de sa petite armée, il triompha des obstacles de la sierra et se dirigea droit vers la capitale, à la lisière des neiges éternelles.
Au cœur du royaume.
Le 8 novembre 1519, Hernando Cortez faisait son entrée avec 400 soldats à pied, une douzaine de cavaliers et quelques canons dans Tenochtitlan, capitale d'un peuple qui comptait un million d'âmes. Devant lui, au milieu du lac Texcoco, dans un cadre admirable, la grande ville orgueilleuse dressait ses pyramides et ses temples. Loin dans la large vallée, la montagne royale de Chapultepec portait le château du souverain mexicain.
Mais à la cour de Tenochtitlan, les pressentiments les plus noirs étreignaient les cœurs. Les envoyés de Montezuma apportèrent des charges d'or, promirent un tribut annuel, tout pour que les Espagnols se retirent.
Le frère de l'empereur voulait, il est vrai, réunir sur-le-champ une armée pour anéantir les étrangers, mais le souverain se décida en faveur d'un accueil amical. « A quoi bon résister, puisque les dieux se sont prononcés contre nous? » déclara-t-il, désespéré.
Cinq chaussées coupées par des ponts traversaient le lac pour mener aux îles sur lesquelles la capitale était construite, telle une Venise mexicaine. La petite armée les franchit et s'installa dans le palais du père de Montezuma, énorme bâtiment aux allures de forteresse en plein cœur de la ville. L'empereur s'était montré généreux et les conquérants ne manquaient de rien. Mais leur liberté de mouvements était fort restreinte dans la cité populeuse et l'inconvénient était surtout grave pour les précieux chevaux qui avaient jusqu'alors emporté la décision dans tous les combats.
Il ne tarda pas à devenir évident que l'on ne considérait que bien à contrecœur les étrangers comme des hôtes. Des doutes sur leur caractère divin s'étaient très vite manifestés parmi les Aztèques. Leur attitude arrogante menaçait en outre de créer une situation critique. On en arriva à des disputes lorsque les intrus se prononcèrent avec plus de netteté contre l'ampleur des sacrifices humains. Même les nouveaux alliés, les troupes de soutien recrutées parmi les populations soumises aux Aztèques, se mirent à harceler les Espagnols. La révolte pouvait éclater d'un jour à l'autre. Dans ce cas, les aventuriers se trouveraient bloqués sur une île difficile à défendre, au milieu d'un lac, où leur supériorité en armement ne leur serait pas d'un grand secours. Ils s'étaient laissé prendre au piège.
C'est alors que Cortez résolut de jouer le tout pour le tout : il emprisonna l'empereur dans son palais où il l'avait attiré grâce à un misérable subterfuge. Il détenait ainsi un otage qu'il pensait bien utiliser au mieux de ses intérêts. Et le calcul se révéla juste.
Désemparés, les nobles, les courtisans et les serviteurs du souverain assistèrent sans réagir au coup de force. L'adoration mystique éprouvée au début pour les dieux blancs s'était changée en haine féroce. Les dirigeants commencèrent à dresser des plans pour se libérer des envahisseurs...
Mais le destin intervint. Au lieu des renforts attendus d'Espagne, ce fut une flotte envoyée par Velâsquez qui aborda les côtes : 18 bâtiments, 900 soldats à pied, 85 cavaliers et 12 canons sous le commandement de Narvaez qui avait mission de ramener enchaîné à Cuba le rebelle Cortez et de continuer la conquête à sa place.
Celui-ci se rendit aussitôt compte du danger mortel qu'il courait. Il laissa 140 hommes derrière lui pour garder l'empereur et tenir la ville, puis se porta avec le reste au devant de son compatriote. La place de La Ver a Cruz lui ouvrit ses portes et une partie des mercenaires espagnols du camp adverse se rallièrent à lui.
Il attaqua sans plus tarder Narvaez qu'il fit prisonnier après un court engagement au voisinage de Cempoala, cette ville où les Blancs avaient pris pour la première fois contact avec la civilisation indienne.
De nouveau la situation s'était retournée. La misérable petite troupe décimée par les combats précédents était désormais devenue une armée imposante, avec une cavalerie fortement armée, résolue, autant que son chef, à risquer le tout pour le tout. La marche vers la capitale fut décidée et entreprise sans retard.
Là-bas, entre-temps, la situation s'était aggravée. Par sa sévérité exagérée et l'exécution d'Aztèques de haut rang, le représentant de Cortez avait suscité une opposition acharnée. A peine les troupes de secours avaient-elles atteint la ville que la lutte ouverte s'engageait. Le palais fut assiégé par une armée puissante réunie à cet effet et chaque fois que les Espagnols se montraient, ils étaient assaillis par une grêle de flèches et de projectiles. Les courageuses sorties des assiégés n'obtenaient aucun résultat. Il devenait nécessaire de prendre des mesures radicales. Cortez décida de se servir de son impérial otage.
Montezuma proposa de parler à son peuple. Ce qui se passait dans l'esprit de ce fier souverain demeurera éternellement mystérieux. Autrefois « Seigneur courroucé » et vainqueur fameux dans de nombreuses batailles, il s'inclinait désormais devant la supériorité de son adversaire et s'humiliait devant son propre peuple.
Il est vrai qu'il n'était plus le chef de celui-ci depuis longtemps. Des cris de dérision l'accueillirent quand il monta sur une plate-forme pour prendre la parole. Une pierre l'atteignit à la tempe et c'est ainsi qu'il finit.
Dans la nuit du Ier juillet 1520, Cortez dut entreprendre une périlleuse retraite sur les étroites chaussées qui traversaient le lac de Texcoco. Il y perdit toutes ses pièces d'artillerie, toute sa poudre, presque tous ses chevaux et la plus grande partie des inestimables trésors qu'il avait amassés. A peine la moitié de ses hommes parvint au rivage. Ce fut la noche triste, la nuit effrayante, dont Cortez et les survivants émergeaient avec ce qu'ils avaient sur le dos, guère plus.
Derrière eux, ils voyaient les feux brûler sur les autels des sacrifices, ils entendaient les hurlements de leurs camarades que Ton égorgeait. Devant eux, toutes les voies étaient bloquées : le peuple aztèque s'était dressé comme un seul homme.
Poursuivi par un ennemi bien supérieur en nombre, le Conquistador longea la rive du lac. Sa position semblait désespérée : l'armée du nouveau souverain, Quauhtemoc, grossissait de jour en jour, toutes les réserves ayant été appelées pour lutter contre ce dangereux adversaire, alors que du côté espagnol il n'y avait guère de soldat qui fût indemne. Cortez lui-même perdait son sang par de nombreuses blessures.
Finalement, la bataille décisive se déclencha, le 8 juillet 1520, vers Otumba. Elle paraissait perdue pour les envahisseurs lorsque Cortez ordonna, à la dernière minute, un assaut désespéré. Et une fois encore, le sort des troupes blanches décimées fut déterminé par la terreur superstitieuse des Indiens devant les cavaliers qu'ils considéraient comme des êtres fabuleux, mi-hommes, mi-bêtes. L'attaque réussit, les Mexicains s'enfuirent, affolés, les auxiliaires indiens se chargèrent de nettoyer le terrain.
Quelques semaines plus tard, Cortez se retournait de nouveau contre la capitale. Les Aztèques, sous le commandement de leur nouvel empereur, Quauhtemoc, se défendirent avec un courage désespéré. Mais cette fois les îles en flammes furent conquises par un millier à peine d'espagnols. Plus de 100 000 cadavres jonchaient les rues de la grande ville qui n'était plus que ruines fumantes.
Les Aztèques, même leurs plus puissants seigneurs, devinrent des esclaves qui durent raser de leurs mains l'antique capitale. La ville impériale fut ainsi anéantie en plein épanouissement.
Mais à la cour de Tenochtitlan, les pressentiments les plus noirs étreignaient les cœurs. Les envoyés de Montezuma apportèrent des charges d'or, promirent un tribut annuel, tout pour que les Espagnols se retirent.
Le frère de l'empereur voulait, il est vrai, réunir sur-le-champ une armée pour anéantir les étrangers, mais le souverain se décida en faveur d'un accueil amical. « A quoi bon résister, puisque les dieux se sont prononcés contre nous? » déclara-t-il, désespéré.
Cinq chaussées coupées par des ponts traversaient le lac pour mener aux îles sur lesquelles la capitale était construite, telle une Venise mexicaine. La petite armée les franchit et s'installa dans le palais du père de Montezuma, énorme bâtiment aux allures de forteresse en plein cœur de la ville. L'empereur s'était montré généreux et les conquérants ne manquaient de rien. Mais leur liberté de mouvements était fort restreinte dans la cité populeuse et l'inconvénient était surtout grave pour les précieux chevaux qui avaient jusqu'alors emporté la décision dans tous les combats.
Il ne tarda pas à devenir évident que l'on ne considérait que bien à contrecœur les étrangers comme des hôtes. Des doutes sur leur caractère divin s'étaient très vite manifestés parmi les Aztèques. Leur attitude arrogante menaçait en outre de créer une situation critique. On en arriva à des disputes lorsque les intrus se prononcèrent avec plus de netteté contre l'ampleur des sacrifices humains. Même les nouveaux alliés, les troupes de soutien recrutées parmi les populations soumises aux Aztèques, se mirent à harceler les Espagnols. La révolte pouvait éclater d'un jour à l'autre. Dans ce cas, les aventuriers se trouveraient bloqués sur une île difficile à défendre, au milieu d'un lac, où leur supériorité en armement ne leur serait pas d'un grand secours. Ils s'étaient laissé prendre au piège.
C'est alors que Cortez résolut de jouer le tout pour le tout : il emprisonna l'empereur dans son palais où il l'avait attiré grâce à un misérable subterfuge. Il détenait ainsi un otage qu'il pensait bien utiliser au mieux de ses intérêts. Et le calcul se révéla juste.
Désemparés, les nobles, les courtisans et les serviteurs du souverain assistèrent sans réagir au coup de force. L'adoration mystique éprouvée au début pour les dieux blancs s'était changée en haine féroce. Les dirigeants commencèrent à dresser des plans pour se libérer des envahisseurs...
Mais le destin intervint. Au lieu des renforts attendus d'Espagne, ce fut une flotte envoyée par Velâsquez qui aborda les côtes : 18 bâtiments, 900 soldats à pied, 85 cavaliers et 12 canons sous le commandement de Narvaez qui avait mission de ramener enchaîné à Cuba le rebelle Cortez et de continuer la conquête à sa place.
Celui-ci se rendit aussitôt compte du danger mortel qu'il courait. Il laissa 140 hommes derrière lui pour garder l'empereur et tenir la ville, puis se porta avec le reste au devant de son compatriote. La place de La Ver a Cruz lui ouvrit ses portes et une partie des mercenaires espagnols du camp adverse se rallièrent à lui.
Il attaqua sans plus tarder Narvaez qu'il fit prisonnier après un court engagement au voisinage de Cempoala, cette ville où les Blancs avaient pris pour la première fois contact avec la civilisation indienne.
De nouveau la situation s'était retournée. La misérable petite troupe décimée par les combats précédents était désormais devenue une armée imposante, avec une cavalerie fortement armée, résolue, autant que son chef, à risquer le tout pour le tout. La marche vers la capitale fut décidée et entreprise sans retard.
Là-bas, entre-temps, la situation s'était aggravée. Par sa sévérité exagérée et l'exécution d'Aztèques de haut rang, le représentant de Cortez avait suscité une opposition acharnée. A peine les troupes de secours avaient-elles atteint la ville que la lutte ouverte s'engageait. Le palais fut assiégé par une armée puissante réunie à cet effet et chaque fois que les Espagnols se montraient, ils étaient assaillis par une grêle de flèches et de projectiles. Les courageuses sorties des assiégés n'obtenaient aucun résultat. Il devenait nécessaire de prendre des mesures radicales. Cortez décida de se servir de son impérial otage.
Montezuma proposa de parler à son peuple. Ce qui se passait dans l'esprit de ce fier souverain demeurera éternellement mystérieux. Autrefois « Seigneur courroucé » et vainqueur fameux dans de nombreuses batailles, il s'inclinait désormais devant la supériorité de son adversaire et s'humiliait devant son propre peuple.
Il est vrai qu'il n'était plus le chef de celui-ci depuis longtemps. Des cris de dérision l'accueillirent quand il monta sur une plate-forme pour prendre la parole. Une pierre l'atteignit à la tempe et c'est ainsi qu'il finit.
Dans la nuit du Ier juillet 1520, Cortez dut entreprendre une périlleuse retraite sur les étroites chaussées qui traversaient le lac de Texcoco. Il y perdit toutes ses pièces d'artillerie, toute sa poudre, presque tous ses chevaux et la plus grande partie des inestimables trésors qu'il avait amassés. A peine la moitié de ses hommes parvint au rivage. Ce fut la noche triste, la nuit effrayante, dont Cortez et les survivants émergeaient avec ce qu'ils avaient sur le dos, guère plus.
Derrière eux, ils voyaient les feux brûler sur les autels des sacrifices, ils entendaient les hurlements de leurs camarades que Ton égorgeait. Devant eux, toutes les voies étaient bloquées : le peuple aztèque s'était dressé comme un seul homme.
Poursuivi par un ennemi bien supérieur en nombre, le Conquistador longea la rive du lac. Sa position semblait désespérée : l'armée du nouveau souverain, Quauhtemoc, grossissait de jour en jour, toutes les réserves ayant été appelées pour lutter contre ce dangereux adversaire, alors que du côté espagnol il n'y avait guère de soldat qui fût indemne. Cortez lui-même perdait son sang par de nombreuses blessures.
Finalement, la bataille décisive se déclencha, le 8 juillet 1520, vers Otumba. Elle paraissait perdue pour les envahisseurs lorsque Cortez ordonna, à la dernière minute, un assaut désespéré. Et une fois encore, le sort des troupes blanches décimées fut déterminé par la terreur superstitieuse des Indiens devant les cavaliers qu'ils considéraient comme des êtres fabuleux, mi-hommes, mi-bêtes. L'attaque réussit, les Mexicains s'enfuirent, affolés, les auxiliaires indiens se chargèrent de nettoyer le terrain.
Quelques semaines plus tard, Cortez se retournait de nouveau contre la capitale. Les Aztèques, sous le commandement de leur nouvel empereur, Quauhtemoc, se défendirent avec un courage désespéré. Mais cette fois les îles en flammes furent conquises par un millier à peine d'espagnols. Plus de 100 000 cadavres jonchaient les rues de la grande ville qui n'était plus que ruines fumantes.
Les Aztèques, même leurs plus puissants seigneurs, devinrent des esclaves qui durent raser de leurs mains l'antique capitale. La ville impériale fut ainsi anéantie en plein épanouissement.
Source : http://www.rhedae-magazine.com/Ameriques-Precolombiennes-le-Mythe-du-Dieu-blanc_a236.html